Torcher des vieux

22 octobre 2013 by Guillaume

Je n’ai pas toujours été un arrrrrtiste, j’ai à certains moments de ma vie gagné de l’argent par un travail honnête. J’ai même commencé dès mes dix-huit ans, par un job d’été. Certains travaillent dans les champs, d’autres débarrassent les parents de leur progéniture le temps d’une colo, d’autres encore vont faire les cons et choper des MST au Club Med. Moi, j’ai eu la chance de pouvoir travailler dans un hôpital, donc au frais et 35 heures. Mais il y a plein de services dans un hôpital, et entre la cuisine, la blanchisserie et d’autres endroits très amusants, le sort m’a fait tomber sur… la maison de retraite.

Tout le monde veut partir en vacances l’été donc il y a pénurie de personnel mais toujours autant de vieux à s’occuper. En tout cas au début de l’été ; à la fin c’est une autre histoire. J’ai donc fait un remplacement d’agent de soins hospitaliers, ce qui consiste en réalité à être aide soignant sans en avoir la qualification nécessaire ni le salaire. Dès le premier jour, on m’a fait sortir des nonagénaires de leurs lits, les foutre à poil et les doucher. Je n’ai jamais vu autant de sexes que l’été de mes dix-huit ans, et j’aurais aimé que ce soit pour d’autres raisons. Je sais depuis lors à quoi nous allons tous ressembler sur la fin de notre vie, et cela m’a donné envie de mourir de mort violente.

Fiche de paye de 1,02€

La plus extraordinaire fiche de paye qu’il m’ait été donné de recevoir.

Je ne sais pas ce que j’avais fait à la DRH de cet hôpital, mais la maison de retraite où on m’a collé était spécialisée dans les "personnes désorientées", autrement dit les dingos. C’est probablement le seul bâtiment que j’aie vu où il faut un digicode pour sortir. Le matin, en plus de devoir lever ces pauvres bougres aux alentours de huit heures pour tenter de faire partir à grandes eaux leur odeur de naphtaline, quelques surprises m’attendaient. La plupart étaient en rapport avec les déjections, comme un sol tellement couvert de pisse qu’il fallait l’éponger avec des draps (ceux dans lesquels vous dormirez à votre prochaine hospitalisation), ou encore de la merde enfoncée à la main dans tous les orifices imaginables d’une salle de bain sauf la cuvette des toilettes. Ce qui est fâcheux car mon poste était multitâche : après le nettoyage des personnes, le nettoyage des chambres.

Le pire c’est qu’à la fin de la journée, même après avoir quitté les hideux vêtements de l’hôpital, le souvenir du travail me poursuivait. Pas la préoccupation, mais l’odeur. L’odeur âcre et pénétrante du vieux en collectivité, un mélange d’urine rance et de produits ménagers.
C’était en 2003, l’été de la canicule. Plusieurs "clients" sont morts pendant mon remplacement et je n’ai eu aucun soucis, ce qui n’aurait pas été le cas si j’avais animé une colonie de vacances.

Deux pouces, c'est vraiment pas terrible !
Sans mauvais jeu de mot, torcher des vieux est un boulot de merde et beaucoup de gens me disaient qu’ils n’auraient pas pu le faire. Pourtant la plupart d’entre eux ont aujourd’hui des travails aussi vils et méprisables que banquier ou prof de sport. Certains ont carrément des enfants, mais trouvent leur caca mignon même s’ils y baignent jusqu’au cou. Comme quoi tout est une question de point de vue.


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