Les coiffeurs, cette caste maudite

20 septembre 2012 by Guillaume

Xavier Dolan, réalisateur

Pour moi les coiffeurs sont un peu comme les dentistes : on va les voir par obligation, ils ont un grand pouvoir sur nous, et on n’ose pas critiquer leur travail de peur qu’ils ne se vengent. Un autre point commun c’est le tarif, ce qui n’encouragera pas les jeunes à entreprendre de longues études pour farfouiller dans des bouches putrides. Je pourrais aussi pointer le fait que ma dentiste tient une conversation d’un niveau de shampouineuse, mais je pense que ça lui est spécifique, personne avant elle ne m’ayant posé de questions sur ma profession tout en me perforant les molaires par pur plaisir. Enfin, comme pour le dentiste, je ne suis pas allé chez le coiffeur pendant plusieurs années, ce qui ne fait pas une très bonne anecdote mais par contre une excellente photo, que vous ne verrez pas.

Si je les ai fuis au point de me laisser pousser un catogan dans un moment d’égarement juvénile, c’est parce que comme beaucoup d’enfants j’ai été traumatisé non seulement par les frottements malencontreux (je présume) de leurs paquets sur mon épaule pendant la coupe, mais surtout par les résultats calamiteux, fruit de leur imagination débridée ou d’une conspiration démoniaque avec les parents. Combien de larmes versées à me voir affublé d’une coupe en brosse, de me voir amputé de mes chères boucles blondes, de me sentir traité comme si j’avais couché avec un Allemand alors qu’encore aujourd’hui c’est quelque chose que je m’interdis par respect pour nos morts !

Xavier Dolan, réalisateur

Xavier Dolan, célèbre réalisateur, dans une habile tentative capillaire de monter dans un manège en trompant la toise.


Les années ayant passé, les blessures de l’enfances se sont refermées et j’ai fini par retourner chez le coiffeur pour m’insérer dans cette société superficielle qui catalogue les gens aux cheveux longs comme des hippies pacifistes, alors que je suis pour la guerre (la conscription est suspendue, ça coûte rien). Mon malheur est que je suis incapable de fournir des indications précises à celui qui va façonner ma nouvelle tête. Je peux difficilement lui demander de repartir sur la même base, car ayant reporté pendant deux mois le jour où je retournerai dans son antre diabolique, on ne peut plus deviner sur quelle base s’est construit le champ de bataille qu’est mon crâne hirsute. Il y a bien les photos des catalogues, mais comme tout catalogue c’est un horrible mensonge et les exemples ne peuvent pas marcher sur moi, qui ai les cheveux secs comme cette enfant qui a entamé avec moi une partie de cache-cache dans le grenier il y a 5 ans.

Mais de toute façon, soyons lucides : à quoi bon essayer de donner des instructions à ces pervers ? Si vous demandez pas trop court, vous repartez quasiment dans le même état (et c’est le même prix) et si vous demandez pas trop long, vous vous faites poncer le crâne jusqu’à l’os. Et à la fin, quand on me demande si ça me va je fais comme au restaurant, je réponds oui, même si un demi rat crevé gît au milieu de mon assiette. Pourtant ce serait tellement plus simple de leur planter les ciseaux dans les yeux et de s’enfuir en courant avec la caisse. Ça, ce serait un coup d’éclat, un grand cri poussé au nom de tous les innocents défigurés par ces orgueilleux qui se croient créatifs, comme si les maçons s’improvisaient architectes.

3 pouces, bien mais pas top.

J’ai finalement trouvé une coiffeuse en qui j’ai une confiance suffisante, parce que je la connais par ailleurs et qu’elle sait, pour avoir fait d’infructueuses tentatives, ce qu’on peut faire ou pas avec ma chevelure récalcitrante et mon caractère intransigeant. Ça ne m’empêche pas de lui acheter régulièrement des produits hors de prix censés rendre mes cheveux soyeux comme ceux d’un enfant que j’aurais scalpé, et de les empiler dans ma salle de bain (les produits, pas les scalps) car je ne les termine jamais et qu’à ce prix-là je n’ose pas jeter. Mais ça vaut mieux qu’une queue de cheval, et mon permis de conduire fait à 18 ans est là pour me le rappeler chaque jour.


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