Beaucoup de lecteurs suivant mes conseils se plaignent de ne rien faire de leur vie parce que je déconseille tout. Je ne vais pas m’excuser d’être objectif et de ne pas céder aux puissants lobbys du tourisme nord-pas-de-calaisien, mais ça tombe bien puisque je vais vous conseiller une sortie qui correspond bien au temps qu’il fait : un p’tit ciné. Et il faut en profiter, un jour tous les films seront en 3D et réalisés par Michael Bay.
En attendant on a toujours Wes Anderson, et son Moonrise Kingdom, qui est quand même autre chose qu’une (inter)minable trilogie inspirée de jouets pour puceaux quadragénaires obèses. Mais je règlerai le sort de Transformers une autre fois, avec un article ou par un autodafé.
C’est un film empreint de nostalgie qui marche très bien, un peu comme Le premier jour du reste de ta vie avec sa musique ou Le Skylab avec ses 4L : suffit de booster un peu les couleurs et hop!, ça te fait regretter les années 60 alors que ta mère était à peine pubère à l’époque. Mais plus que l’époque, ce qui crée ce sentiment c’est que ce soit une histoire avec des enfants, mais pas des enfants comme on en croise tous les jours : alors que dans la vie ils sont sales et teigneux au point de se poser des questions, dans le film ils sont aussi sales et teigneux mais on les aime, on a envie peut-être pas de les élever, mais au moins d’être à leur place, d’être amoureux, de construire des cabanes dans des arbres de trente mètres, de fuguer en canoë et d’attirer la foudre.
Fait plutôt rare au cinéma, chaque plan est réfléchi, comme une photo ou même un tableau, avec une véritable composition qui parfois est un gag en elle-même, et très souvent quelque chose à voir au second plan. Comme quoi on peut raconter une histoire, et faire un film rythmé sans pour autant le monter comme un clip, avec des plans ultra-courts servant à masquer le manque de créativité, l’approximation et le recyclage des films précédents. Mais j’avais dit que j’arrêtais avec Michael Bay, pardon. Le film est une réussite tant sur le plan esthétiquement que sur le scénario, et les personnages, tous loufoques dans leur propre genre, sont interprétés par des mecs qui connaissent le job (Bruce Willis, Edward Norton et le grand Bill Murray) et par des gamins qui à 13 ans ont déjà mieux orienté leur carrière que Shia LaBeouf qui est un peu à Indiana Jones 4 ce que Jar Jar Binks est à La Menace fantôme.
Vous l’aurez compris, ceci est une injonction à aller voir Moonrise Kingdom dès ce soir, et par pitié respectez les comédiens et respectez-vous, essayez de le voir en VO et pas avec des voix de canards qui tentent vainement de coller aux mouvements des lèvres.
Vous aurez remarqué que cet article est truffé de name dropping (en français on dit largage de nom, ce qui explique pourquoi les Sex Pistols se sont mieux exportés que les Charlots) mais c’est pour tester votre culture populaire et si vous êtes largué, ça vous fait un paquet d’articles wikipédia à visiter pendant votre journée au bureau : Michael Bay, Wes Anderson, Transformers, Le Premier Jour de reste de ta vie, Le Skylab, Bruce Willis, Edward Norton, Bill Murray, Shia LaBeouf, Indiana Jones et le Royaume du crâne de cristal, Jar Jar Binks, La Menace Fantôme, Sex Pistols, les Charlots, Wikipédia.